vendredi 14 août 2009

Interview ARER

Voici un lien vers la récente interview que j'ai donné sur le site de l'Agence Régionale pour l'Energie Réunion (AERER), disponible ici : http://www.arer.org/news/affiche_news.php?article=401

Je reproduis ci-dessous l'interview :

Droit et Energies - Invité: M. Adrien FOURMON, Avocat [12/08/2009] - par Richard HUITELEC







Dans le cadre de l'objectif d'autonomie énergétique à l'horizon 2025, l'ARER poursuit ses interviews auprès des professionnels du droit de toute horizon sur la thématique "Droit et Énergies". Le nouvel invité est Maître Adrien FOURMON, avocat.

Quelles sont vos différentes activités dans le domaine de l'environnement et/ou de l'énergie?

Je suis avocat au barreau de Paris et collaborateur de Maître Christian HUGLO et de Maître Corinne LEPAGE au sein du Cabinet HUGLO LEPAGE & Associés Conseil, spécialisé en droit public et en droit de l’environnement. Le cabinet a développé une activité contentieuse et de conseil en droit public et en droit de l’environnement et bénéficie d’une réputation incontournable dans ces domaines.

Je suis titulaire d’un LLM en droit commercial international de l’Université de Nottingham et d’un Mastère Spécialisé en droit international des affaires et management de l’Essec.

J’interviens au sein du cabinet principalement dans les domaines du droit public économique et de droit commercial, dans le conseil et l’assistance juridique aux montages d’opérations publiques et privées.

Je suis particulièrement impliqué dans le secteur de l’énergie et des EnR et plus généralement des nouvelles technologies environnementales ainsi que dans le secteur du transport, dans le cadre des montages des projets, avec une prise en compte des enjeux liés au développement durable.

J’enseigne cette année dans le cadre du master professionnel "Ingénierie des partenariats privé-public" de l’IEP de Lyon un séminaire portant sur l’approche développement durable dans les PPP et les aspects de conseil et de contentieux du développement d’un projet.

L'objectif affiché par La Région Réunion et ses partenaires est celui d'une autonomie énergétique à l'horizon 2025, qu'en pensez-vous?

L’objectif semble tout à fait réalisable. La Réunion dispose désormais de tous les outils pour y parvenir. Avec une part de 36 % de la consommation totale d’électricité provenant des EnR, en constante augmentation, et les récents objectifs fixés par le Grenelle de la Mer avec notamment le Plan « Energies bleues » qui insiste sur le développement des énergies marines, tout mène à penser que l’objectif, qui a été fixé en 1999 par le Président de la région Paul Vergès, est atteignable. Cependant, cela suppose de ne pas relâcher les efforts déjà engagés.

L’autonomie énergétique à l'horizon 2025 reste un objectif ambitieux qui reflète également l’objectif national de la France de porter la part des énergies renouvelables à au moins 23 % de la consommation d’énergie finale d’ici à 2020 et celui de l’Union européenne de façon plus générale (les 3 fois 20) en matière de contribution à la lutte et à l'adaptation au changement climatique, qui doit être placé au premier rang des priorités.

Dans cette perspective, la loi « Grenelle I » n° 2009-967 du 3 août 2009 a confirmé l’engagement pris par la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 en réduisant de 3 % par an, en moyenne, les rejets de GES dans l’atmosphère, afin de ramener à cette échéance ses émissions annuelles à un niveau inférieur à 140 millions de tonnes équivalent de dioxyde de carbone.

Il s’agit d’un objectif global, qui doit être considéré par une approche différenciée, en fonction des enjeux, des opportunités, des contraintes et des spécificités locales qu’elles soient sociétales, environnementales, énergétiques et économiques (suivant la théorie de l’optimum de Pareto).

La France s’est fixée comme objectif de devenir l’économie la plus efficiente en équivalent carbone de la Communauté européenne d’ici à 2020 ; la Réunion pourrait devenir l’un des champions français en la matière et servir ainsi d’exemple au reste de l’Outre-mer et à la Métropole.

La loi Grenelle I a d’ailleurs fixé un objectif, dès 2020, de 50 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale au minimum dans les collectivités territoriales d’Outre-mer (20% pour Mayotte).

Un autre aspect important pour conforter l’objectif d’autonomie énergétique réside dans la nécessité de développer des technologies de stockage de l’énergie et de gestion du réseau pour augmenter la part de la production d’EnR intermittente.

Les collectivités locales ont-elles, selon vous, les compétences adéquates pour accompagner cet objectif?

On ne peut que saluer l’implication de la Région Réunion dans son objectif d’autonomie énergétique pour 2025 et notamment l’aide qu’elle apporte aux différentes communes de l’île. L’important est de faire la promotion du recours aux énergies renouvelables non seulement aux entreprises mais aussi aux particuliers qui représentent près de 46 % de la consommation totale d’énergie de l’île.

L’autonomie énergétique en 2025 ne se réalisera pas sans une implication forte de la part de chacune des collectivités locales, elles seules disposent de moyens suffisants pour concrètement mettre en place cette stratégie.

L’action des collectivités locales en matière d'urbanisme doit désormais contribuer à la lutte contre le changement climatique et à l'adaptation à ce changement, conformément aux dispositions de l’article L110-1 du code de l’urbanisme.

L’atteinte de cet objectif dépendra donc de l’implication concrète des collectivités ; leur rôle incitatif est également primordial.

La conciliation des objectifs de protection de l'environnement (site, paysages, biodiversité) et de développement des énergies renouvelables est parfois délicate. Comment la concevez vous?

Il est vrai que la question est délicate, notamment compte tenu des récents débats et controverses liés aux éoliennes et à leur impact sur la biodiversité et la détérioration des paysages. Le développement des EnR doit bien entendu se faire avec le moins de dommages collatéraux possible, et avec les compensations nécessaire pour maintenir un certain équilibre.

Les effets négatifs des éoliennes notamment en terme de bruit, de dangers pour la faune et de contraintes pour le paysage constituent en effet un frein au développement de ce type d’énergie.

A ce propos, le développement du solaire photovoltaïque représente un bon compromis en terme d’équilibre entre protection de l’environnement d’une part et développement des EnR d’autre part.

Pareillement, l’impact de l’utilisation des énergies marines sur la biodiversité et sur les sites de production d’énergie doit être pris en compte et reste encore peu connu. Plusieurs propositions ont dores et déjà été avancées par des chercheurs, notamment la confection de système acoustique permettant de maintenir les mammifères marins à l’écart des infrastructures productrices d’énergie.

Pensez-vous que les questions de réglementation et de législation sont des problématiques bien comprises par les différents acteurs dans le domaine de l'énergie et du développement durable?

Clairement, non. Il y a à mon sens à ce jour une déficience importante d’information des différents acteurs et parties prenantes dans le domaine de l'énergie et du développement durable. Construire une nouvelle économie conciliant protection de l’environnement, progrès social et croissance économique exige une prise en compte élargie et la mobilisation de la société sur ces domaines.

D’ailleurs, l’Etat s’est fixé comme objectif que, d’ici à 2012, les formations initiales et continues dispensées à ses agents comportent des enseignements consacrés au développement durable et à la prévention des risques sanitaires, sociaux et environnementaux adaptés aux fonctions et responsabilités auxquelles préparent ces formations.

Ce déséquilibre d’accès à l’information existe pareillement dans la sphère privée qui souffre d’un manque d’expertise et de main d’œuvre qualifiée pour faire face aux objectifs fixés en la matière.

La promotion actuelle de l'élaboration des Plans Climats Territoriaux est-elle accompagnée d'un encadrement réglementaire et législatif adéquat?

La loi Grenelle I va permettre le renforcement du rôle des collectivités publiques pour des programmes d'aménagement durable. Celles-ci ont un rôle d’exemplarité et d’orientation à jouer en la matière.

Selon l’article 7 de la loi Grenelle I, le rôle des collectivités publiques dans la conception et la mise en oeuvre de programmes d’aménagement durable doit être renforcé, l’Etat incitant les collectivités locales à établir, « plans climat-énergie territoriaux » (PCET) avant 2012.

L'Etat incite ainsi les collectivités (régions, les départements et les communes et leurs groupements de plus de 50 000 habitants) à établir des PCET en cohérence avec les autres documents d'urbanisme, et tout particulièrement les SCOT et PLU.

Les collectivités locales vont donc jouer un rôle majeur en tant qu’acteur direct et indirect compte tenu des nombreuses implications qu’elles peuvent avoir dans le domaine de l’énergie.

Si vous deviez modifier ou introduire une règle juridique pour favoriser les énergies renouvelables, que feriez-vous?

Il est nécessaire de développer une planification du territoire intégrant pleinement les enjeux du développement durable. C’est pourquoi il est nécessaire que les règles d’urbanisme permettent à l’avenir l’intégration obligatoire des EnR au sein des plans locaux d’urbanisme et que la mise en place de projets d’aménagement et d’urbanisme fassent partie intégrante des stratégies énergétiques et d’adaptation au changement climatique des collectivités locales.

A ce jour, il ne s’agit que d’une faculté, suivant l’article L123-1 du code de l’urbanisme, les PLU ne pouvant que « recommander » l'utilisation des énergies renouvelables pour l'approvisionnement énergétique des constructions neuves, en fonction des caractéristiques de ces constructions, sous réserve de la protection des sites et des paysages.

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