mardi 15 mai 2012

Tarif d’achat éolien et aide d'état : le Conseil d’Etat renvoie à une question préjudicielle devant la Cour de justice de l'Union européenne

Par un arrêt du 15 mai 2012, le Conseil d’Etat a prononcé le sursis à statuer sur le litige dont il a été saisi par l'association "Vent de Colère" et a décidé d'un renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur la question de la qualification de l’arrêté tarifaire du 17 novembre 2008 en tant qu’aide d’Etat et la question « déterminante pour la solution du litige » et présentant « une difficulté sérieuse »de la notification d’une telle aide à la Commission européenne, le cas échéant. 

Le Conseil d'Etat a ainsi posé une question relative à l’interprétation d’une règle du droit de l’Union qu’il estime nécessaire pour résoudre ce litige dans ces termes : « si, compte tenu du changement de mode de financement de la compensation des surcoûts imposés à Electricité de France et aux distributeurs non nationalisés à raison de l’obligation d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent à un prix supérieur au prix de marché de cette électricité (…), ce mécanisme doit désormais être regardé comme une intervention de l’Etat au moyen de ressources d’Etat au sens et pour l’application des stipulations de l’article 87 du traité instituant la Communauté européenne ». 

Lors de l’audience du 12 mars 2012, le Rapporteur public avait notamment estimé que les évolutions réglementaires en cause dans cette affaire aboutissaient à qualifier d’aide d’Etat le mécanisme de tarif d’achat éolien mis en place par l’arrêté tarifaire dès lors que la CSPE était financée par les consommateurs d’électricité. L’Etat ayant la maîtrise de ces fonds issus d’un prélèvement de caractère obligatoire. Dans une note en délibéré, le Ministère avait alors demandé que le Conseil d’Etat saisisse la CJUE de cette question.

Le renvoi préjudiciel, défini à l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne permet à la juridiction nationale de saisir la juridiction de l’Union, dès lors qu’elle estime qu’un élément du droit de l’Union Européenne (primaire ou dérivé) doit être interprété ou validé (cf. P. OLIVIER, « La recevabilité des questions préjudicielles : la jurisprudence des années 1990 », Cahiers de droit européen, n° 1-2, 2001). 

Ce dispositif permet d'assurer l'application unitaire et correcte du droit de l'Union et constitue un mécanisme de coopération entre le juge national et le juge de l’Union Européenne le juge national pouvant interroger le juge européen en lui posant des questions sur l'interprétation du droit de l'Union ou la validité de la jurisprudence de la Cour (cf. note informative sur l’introduction de procédures préjudicielles par les juridictions nationales (2011/C 160/01).

Cette compétence générale lui est conférée par les articles 19, paragraphe 3, sous b, du traité sur l’Union européenne et 267 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

La CJUE se prononce sur l’interprétation ou la validité du droit de l’Union, en s’efforçant de donner une réponse utile pour la solution du litige, mais c’est à la juridiction de renvoi qu’il revient d’en tirer les conséquences, le cas échéant en écartant l’application de la règle nationale en question.

L’introduction d’une question préjudicielle entraîne la suspension de la procédure nationale jusqu’à ce que la Cour ait statué. Ainsi, pour rendre sa décision, le Conseil d'Etat devra attendre le prononcer de la décision de la CJUE, afin de trancher le litige au principal.

La décision du Conseil d’Etat maintient donc l’incertitude sur la filière en renvoyant sa question relative à l’interprétation de l’arrêté tarifaire éolien à la justice européenne.

Adrien FOURMON

vendredi 4 mai 2012

Reporting RSE : recours devant le Conseil d'Etat


source : Novethic.fr, 03/05/2012

Depuis la loi NRE de 2001, les entreprises cotées doivent fournir des informations sur des thèmes environnementaux, sociaux et sociétaux ce qui a conduit les plus importantes à publier des rapports développement durable.

L'article 225 de la loi Grenelle 2 adoptée en 2010 prévoyait initialement d’étendre cette obligation aux entreprises de plus de 500 salariés.

Le décret d'application de l'article 225 de la loi Grenelle 2 concernant le reporting extra-financier des entreprises qui obligent les entreprises de plus de 500 salariés à publier des informations environnementales et sociales, fait l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat.

Suite à la publication du décret d’application de l’article 225, le 26 avril 2012, le Forum citoyen pour la RSE, association qui représente des ONG, des syndicats et d’autres parties prenantes a annoncé le 2 mai qu’il allait intenter un recours devant le Conseil d’Etat. L’association estime que le décret va à l’encontre de « la lettre et de l’esprit de la loi Grenelle 2» et conteste en particulier la distinction faite entre entreprises cotées et non cotées.

On signalera les deux avis défavorables du conseil d’Etat concernant le risque juridique d’une distorsion de concurrence entre les entreprises et la violation du principe d’égalité de traitement.

Ainsi, de grandes entreprises françaises non cotées (telles que le distributeur Auchan) seraient ainsi soumises des obligations moindres que leurs homologues cotées.

On précisera que le décret est applicable aux sociétés cotées et non cotées. Les sociétés cotées sont concernées pour les exercices ouverts après le 31 décembre 2011, avec l’obligation de justifier, le cas échéant, « les raisons pour lesquelles elles sont trouvées dans l’impossibilité de fournir certaines des informations ».

Quant aux sociétés non cotées concernées, ce sont celles dont le total du bilan ou le montant net du chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros et dont le nombre moyen de salariés est supérieur à 5 000.

Ce délai est rallongé d’un an pour les sociétés non cotées dont le total du bilan ou le montant net du chiffre d’affaires dépasse 400 millions d’euros et dont le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice est supérieur à 2 000, puis de deux ans pour les sociétés non cotées dont le total du bilan ou le montant net du chiffre d’affaires dépasse 100 millions d’euros et dont le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice est supérieur à 500, aux exercices ouverts après le 31 décembre 2013.

Enfin, on retiendra que la certification est demandée aux sociétés cotées, à partir de l’exercice ouvert après le 31 décembre 2011 et aux sociétés non cotées, à partir de l’exercice clos au 31 décembre 2016.

Adrien FOURMON