jeudi 12 août 2010

Performance énergétique des bâtiments : la nouvelle directive D.P.E.B.II

Performance énergétique des bâtiments : la nouvelle directive D.P.E.B.II

article publié sur le site http://www.circumeo.com en date du 16/07/2010

Le Parlement européen a adopté en seconde lecture le 18 mai 2010 la nouvelle directive EPBD II sur la performance énergétique des bâtiments qui devra être transposée au plus tard le 31 janvier 2012. Il s’agit en réalité d’un remaniement de la directive 2002/91/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002, dont le champ d’application a été élargi et certaines dispositions précisées. L’objectif est de définir de nouveaux critères, de nouveaux buts et créer des fonds pour améliorer l’impact de la directive originelle.

En 2002, le Parlement européen adoptait une directive relative à la performance énergétique des bâtiments. A l’époque celle-ci avait pour objet l’application de deux textes : le protocole de Kyoto d’une part et Le Livre Vert sur la sécurité d’approvisionnement énergétique d’autre part. Cette directive répondait déjà aux alertes relatives à la dépendance énergétique trop importante de l’Union Européenne. Il apparaissait donc indispensable de renforcer et de clarifier cette directive, afin de rendre ses dispositions plus efficace, plus effective à l’aube notamment, en France, de l’adoption, le 29 juin 2010, du projet de loi Grenelle 2 à l’Assemblée Nationale.

Objectif de la directive D.P.E.B.II

Le secteur du bâtiment est responsable de 40% de la consommation d’énergie et de 35% de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre. Dès lors, l’amélioration énergétique des bâtiments semble être le moyen le plus attractif pour atteindre l’objectif climatique fixé par l’Union Européenne de réduction de la consommation d’énergie de 20% en 10 ans et 30% en en cas de conclusion d’un accord international.

Ainsi, les Etats membres devront adapter leurs codes de la construction et de l’habitation afin que tous ces bâtiments construits après 2020 soient adaptés aux nouvelles normes énergétiques (d’ici 2018 pour les bâtiments occupés par des administrations publiques). La directive fait partie d’un paquet « efficacité énergétique » comportant des mesures plus large.

La directive prévoit une utilisation efficace, prudente, rationnelle et durable des produits pétroliers, gaz naturels et combustibles solides, car ce sont des sources d’énergies principales mais également les principales sources d’émission de dioxyde de carbone. Il apparaît donc essentiel de réduire la consommation d’énergie produite et d’accroître l’utilisation d’énergie produite à partir des sources renouvelables afin d’assurer la promotion de la sécurité des approvisionnements en énergie, le développement des technologies, la création d’emplois et le développement régional.

La directive fixe des objectifs nationaux contraignants en matière de CO2. En effet, 7 millions de tonnes de CO2 pourraient être stockées en 2020 et jusqu'à 160 millions de tonnes en 2030, en partant d'une hypothèse de 20 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020. La gestion de la demande d’énergie est un outil important permettant à l’Union d’influencer le marché mondial.

Champ d’application de la directive D.P.E.B.II

La directive concerne les bâtiments neufs et existants. Elle prévoit des exigences plus élevées pour les nouveaux bâtiments.

Tous les bâtiments construits à partir de fin 2020 devront comporter des normes élevées d’économie d’énergie et être alimentés dans une large mesure par des énergies renouvelables. Le secteur public devra montrer la voie, les plans nationaux seront invités à fixer des objectifs plus ambitieux pour les bâtiments occupés par les autorités publiques (tel que les supermarchés, théâtres, écoles…). La directive prévoit aussi des campagnes d’informations pour encourager d’avantage les propriétaires et locataires de bâtiments à améliorer leurs performances énergétiques. Avant de débuter la construction, une étude de faisabilité technique, environnementale et économique doit être établie qui prendra en compte un certain nombre d’éléments. (système d’approvisionnement en énergie décentralisée, cogénération, système de chauffage, pompe à chaleur…), les Etats devant garantir cette étude. Une partie du financement proviendra du budget de l’UE.

Conformément aux principaux objectifs de la directive, les bâtiments déjà existants devront également s’adapter aux nouvelles exigences de performance énergétique. Le texte (article 7 et 8) encourage l’amélioration de bâtiments existants lors de rénovations importantes « dans la mesure où cela est techniquement, fonctionnellement et économiquement » réalisable, sur la base de programmes nationaux. La directive prévoit l’installation à cette occasion de « compteurs intelligents » aptes à mesurer la quantité d’énergie consommée et la période de la journée à laquelle intervient cette consommation. De telles exigences minimales en matière de performance énergétique seront également imposées aux éléments de construction et pour les systèmes techniques du bâtiment (eau chaude, chauffage, climatisation). Là encore, le secteur public devra se montrer exemplaires, car les Etats membres auront l’obligation d’adopter d’ici le 30 juin 2011 des plans nationaux instaurant des instruments financiers pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments (partenariat public/privé, logique « verte », contrats de performances énergétiques, certificats d’économie d’énergie, prêts à taux réduits, réductions fiscales…).

Ainsi, si les dispositions sont respectées, la directive prévoit, d’après son article 9, que tous les nouveaux bâtiments devront être à consommation d’énergie quasi-nulle, c’est à dire produire autant d’énergie qu’ils en consomment, et permettre ainsi d’aboutir à ce nouveau concept « nearly zero energy ». La France a déjà retranscrit cette obligation dans le texte de loi dite Grenelle I. Son article 4 fixe un objet similaire : « Toutes les constructions neuves faisant l’objet d’une demande de permis de construire déposée à compter de fin 2020 présentent, sauf exception, une consommation d’énergie primaire inférieure à la quantité d’énergie renouvelable produite dans ces constructions, et notamment le bois énergie. »
Un certain nombre de bâtiments demeurent cependant exclus du champ d’application de la directive, comme les petits logements (moins de 50m2 de surface couverte), les maisons de vacances utilisées moins de quatre mois par an (où dont l’utilisation est inférieure à 25% de la consommation d’énergie annuelle), les bâtiments servant aux cultes, les bâtiments temporaires utilisés pendant deux années ou moins, les sites industriels, les ateliers et bâtiments agricoles à faible demande énergétique ainsi que les bâtiments historiques protégés.

D’une manière générale, la directive préconise d’encourager l’introduction de systèmes intelligents, mesurés, à chaque fois qu’un bâtiment est construit ou fait l’objet de travaux de rénovation importants.

Méthodes d’application

La Commission établit un cadre méthodologique comparatif pour calculer les niveaux optimaux en fonction des coûts des exigences minimales en matière de performance énergétique. La méthode de calcul prend en considération des caractéristiques techniques et d’autres facteurs ( installation de chauffage, de climatisation, d’énergie renouvelable), le calcul durant toute l’année et non limitée à la période où le chauffage est nécessaire. En outre, les bâtiments ont une incidence sur la consommation d’énergie à long terme. Ils doivent donc répondre à des exigences minimales en matière de performance énergétique adaptées aux conditions climatiques et aux particularités locales.

Par ailleurs, les Etats membres doivent établir une liste énumérant les mesures existantes et proposées autres que celles requises dans la directive, pour par exemple, réduire les barrières commerciales et juridiques, encourager les investissements, réduire la pauvreté écologique… Pour cela, ils peuvent bénéficier d’une assistance, de conseils techniques gratuits ou subventionnés ou encore de régimes de prêts bonifiés.

La directive améliore le contenu des certificats de performance énergétique et renforce l’obligation d’affichage dans les bâtiments publics. En effet, le secteur public devrait jouer un rôle moteur dans les bâtiments publics qui ont une superficie utile totale de plus de 500 m2 et qui sont fréquentés par le public, des certificats de performance énergétique devront être affichés de manière visible. Dans cinq ans ce seuil sera abaissé à 250 m2.

Des certificats de performance devront être établis et fourniront des informations sur l’incidence réelle des systèmes de chauffage et de refroidissement, sur la consommation d’énergie primaire, et sur les émissions de CO2. Elle rappelle, de plus, que l’élaboration de stratégies contribuant à améliorer les performances techniques est une priorité. C’est ainsi que les installateurs et constructeurs devront être formés pour acquérir des compétences certaines en la matière, pour faciliter l’installation et l’intégration de technologies favorisant l’énergie renouvelable.

La directive prévoit également dans son article 12, l’obligation de faire figurer dans les publicités immobilières l’indicateur de performance énergétique du certificat de performance énergétique du bâtiment, certificats établis, selon l’article 17 par des experts indépendants, agréés et qualifiés (liste mise à jour à la disposition du public), ce qui garantit un système de contrôle indépendant, ainsi qu’un rapport d’inspection.

Enfin, les Etats membres devront mettre en place un système d’homologation pour mesurer la performance énergétique des bâtiments résidentiels. La Commission devra, quant à elle développer, d’ici le 30 juin 2011, un système de certification volontaire de la performance énergétique des bâtiments non résidentiels qui soit commun à toute l’Union Européenne. L’article 10 précise que les Etats doivent prendre les mesures les plus appropriées d’ici 2011, pour déterminer les instruments les plus pertinents à la lumière du contexte national et la Commission devra ensuite examiner l’efficacité de ces mesures.

Un programme de travail pour 2010 baptisé « Energie Intelligente-Europe 2 » a été publié par la Commission européenne le 23 mars 2010 afin d’établir une méthodologie commune pour calculer la performance énergétique des bâtiments et les axes de progrès à privilégier pour cette année. Ce programme permettra avec d’autres ( « Villes Intelligentes » par exemple) de faire connaître les initiatives existantes, et a pour finalité l’aide technique en faveur de la création de fonds renouvelables nationaux.

Enfin, cette directive trouve une application concrète dans la loi dite Grenelle 2 adoptée le 11 mai 2010 à l’Assemblée Nationale, puisque dans son volet « Construction et Urbanisme », elle prévoit une amélioration énergétique des bâtiments et l’harmonisation des outils de planification et prend un certain nombre d’engagements concernant le développement des contrats de performance énergétique ou l’amélioration du diagnostic de performance énergétique des bâtiments dans le sens de la directive 2010/31/UE du 19 mai 2010.

Il convient également de souligner l’adoption de la directive 2010/30/UE du 19 mai 2010 concernant l'indication, par voie d'étiquetage et d'informations uniformes relatives aux produits, de la consommation en énergie et en autres ressources des produits liés à l'énergie (parue au JOUE le 18/06/2010). Cette directive 2010/30 doit être transposée avant le 20 juin 2011 et les objectifs devront être mis en place dans les Etats membres au plus tard le 21 juillet 2011.

Elle harmonise les mesures nationales concernant l'information des utilisateurs finals par voie d'étiquetage et d'informations de la consommation d'énergie des produits. Ces mesures visent à permettre aux utilisateurs finals de choisir des produits ayant un meilleur rendement.

Elle prévoit notamment un élargissement des produits concernés par l'étiquetage. Seront ainsi concernés tous les "produits qui ont une incidence significative directe ou indirecte sur la consommation d'énergie et, le cas échéant, sur d'autres ressources essentielles pendant leur utilisation."

Adrien FOURMON
Avocat au barreau de Paris
SELARL HUGLO LEPAGE & Associés Conseil