mardi 11 août 2009

Instruments économiques pour la régulation environnementale : la taxe carbone et l'efficacité économique comme seul critère de choix ?

La convocation de la conférence d’experts sur la contribution climat énergie (CCE) est une occasion de revenir sur la question de l’évolution des instruments économiques de l’environnement, afin de donner un prix au carbone et de la place prépondérante de l’économie dans le Grenelle de l’Environnement.

Les effets externes tels que les gaz à effet de serre peuvent entraîner des coûts très élevés pour la société dans son ensemble alors qu'ils sont le fait de certains agents économiques qui ne paient pas les coûts de ces effets. Le rapport Stern a démontré que le coût de l’inaction pouvait se chiffrer entre 5 et 20 % du PIB mondial.

La question du choix entre les instruments de correction des externalités environnementales font toutefois apparaitre que la combinaison des instruments peut être un moyen de corriger certains problèmes généralement associés au recours à un seul type d’instrument.

Ainsi, nous voyons apparaître un bouquet de mesures incitatives et contraignantes permettant d’aboutir à l’objectif fixé de protection de l’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique, tout en assurant une flexibilité et une meilleure efficacité des actions en réduisant les coûts, afin de tendre vers le développement dune économie « verte ».

Tous les instruments économiques disponibles possèdent leurs avantages et inconvénients. Une analyse coût avantage permet d’optimiser les dispositifs et d’aboutir à un effet redistributif (le double, voire triple dividende économique, environnemental et social) en augmentant l'efficacité des mesures. C’est ce que l’on nomme dans le jargon économique « l’optimum de Pareto ».

Le recours aux instruments économiques de régulation environnementale est désormais largement admis comme un moyen de corriger les effets négatifs d’externalités telles que le rejet d’émissions polluantes et les émissions de gaz à effet de serre.

On peut citer, en matière de mécanismes de marché, notamment les quotas d’émission de CO² ; les certificats d’économie d’énergie, l’obligation d’achat de l’électricité d’origine renouvelable, les garanties d’origines.

Le recours aux autres instruments économiques et notamment à la fiscalité est plus délicat. La France a recours depuis plusieurs années à la TGAP et le TIPP. Avec le Grenelle de l’Environnement, nous allons prochainement voir aboutir la taxe carbone.

La taxe carbone est un montant que doit payer un émetteur pour chaque unité émise. La taxe doit être établie au niveau du coût marginal optimum, pour que les agents choisissent le niveau d'émission optimal. En effet, si un agent a un coût marginal de dépollution plus faible que la taxe il a intérêt à dépolluer plutôt que de payer la taxe. Si, par contre, le niveau de dépollution est tel que le coût de dépollution de la dernière unité est plus élevé que le niveau de la taxe, l'agent à intérêt à payer plutôt que dépolluer.

D’autres mécanismes sont encore en cours de discussion, notamment les péages urbains, dont le succès apparaît vident chez nos voisins européens.

La supériorité souvent alléguée des instruments économiques sur les instruments réglementaires est générale sans être pourtant systématique, dépendant en particulier des imperfections de l'information ou de la concurrence. L'argument de l'efficacité ne suffit pas toujours à imposer l'utilisation d'un instrument là où des considérations d'acceptabilité prévalent.

Le débat sur la contribution énergie-climat est donc ouvert.

La conférence d’experts devra ainsi se prononcer à la fois sur l’assiette et le taux de la CCE mais aussi sur son instrument juridique.

Le Livre blanc présenté par le Ministre de l’Ecologie retient à ce stade deux hypothèses. Une première possibilité dite « additionnel » consisterait à ajouter cette contribution aux taxes existantes. Une deuxième possibilité dite « différentiel » reviendrait à créer une nouvelle taxe, assise sur le contenu en CO² des énergies fossiles.

La révolution fiscale verte est en cours, cependant il n’est pas n’envisagé une entrée en vigueur avant 2011.

La combinaison des instruments est bien selon nous un moyen efficace de parvenir à la réduction des émissions de GES souhaitée et réduit le risque d’erreur du régulateur, celui-ci ayant plusieurs leviers à sa disposition pour éventuellement corriger son action.

Nous en conclurons qu’au-delà des seuls critères théoriques d’efficacité économique et environnementale, la comparaison entre différents instruments nécessite pour être conclue, d’intégrer le contexte de leur mise en œuvre.

Adrien FOURMON
Avocat à la Cour
SELARL HUGLO LEPAGE et Associés Conseil


Publié aux Petites Affiches n°148
27 juillet 2009

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