vendredi 7 août 2009

Développement durable : un moteur pour les PPP

Le rapprochement entre partenariat public-privé et développement durable n’est pas un effet de mode ou un rapprochement de circonstance.
La notion de développement durable est prise en compte dans la problématique des PPP, suivant la loi du 28 juillet 2008 modifiée par une décision du Conseil constitutionnel du 24 juillet 2008.

Le rapprochement entre partenariat public-privé et développement durable n’est pas un effet de mode ou un rapprochement de circonstance.
Le droit de la commande publique n’échappe pas à sa prise en compte dans un double contexte réglementaire.
Au niveau communautaire, l’article 6 du Traité CE stipule que les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques de la communauté (adoption des mesures intégrant les besoins en matière d’environnement dans la planification et, l’exécution des activités économiques et sociales).
Les interventions du législateur communautaire en faveur de la prise en compte des considérations environnementales se sont traduites par les directives marchés n°2004/17 et 2004/18 du 31 mars 2004.
En France, le décret n°2004-15 du 7 janvier 2004 portant code des marchés publics a intégré ces préoccupations environnementales au niveau des critères de jugement des offres et des candidatures tandis que l’article 6 de la Charte de l’Environnement a conféré au développement durable une valeur constitutionnelle, puisque « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social ».

Dès lors la promotion du développement durable fait partie des objectifs essentiels devant être poursuivis par les personnes publiques lorsqu’elles procèdent à leurs achats quelqu’en soit l’objet.

Ainsi, se pose la question de savoir en quoi le contrat de partenariat public-privé peut-il favoriser la promotion du développement durable ?

Après avoir défini les conditions du rapprochement développement durable et Partenariat public privé, nous examinerons les conséquences de ce rapprochement.

I LES CONDITIONS DU RAPPROCHEMENT DEVELOPPEMENT DURABLE ET PARTENARIATS PUBLIC-PRIVES
Le recours au contrat de partenariat (CP) se traduit ainsi par la définition des besoins de la personne publique, et par les objectifs de performance dans le domaine du développement durable.

La définition des besoins de la personne publique

Comme l'a confirmé le Conseil d'Etat dans son arrêt du 29 octobre 2004, M. Sueur et autres, l'évaluation préalable, prévue à l'article 2 de l'Ordonnance du 17 juin 2004, doit permettre de répondre à deux questions :
Le partenariat est-il possible ? Le partenariat est-il souhaitable ?

En outre, une évaluation réalisée par la personne publique doit démontrer que ce choix contractuel offre une solution alternative moins coûteuse et/ou plus avantageuse.

S’agissant de la deuxième question, la personne publique doit exposer les éléments d'analyse économiques, juridiques, financiers et administratifs qui justifient le recours au PPP plutôt qu'à un montage classique (marché public/DSP) ou à une gestion en régie. L'évaluation préalable devra démontrer que les avantages attendus du CP justifient le recours à cette procédure. A priori, en termes de performance, le CP devrait s'avérer plus attractif que le marché public en ce qu'il permet de lier le montant des paiements à des objectifs de performance négociés entre les parties et mesurés par des indicateurs. Enfin, le CP devrait aboutir à une mise en service rapide de l'infrastructure.
Le titulaire du PPP doit proposer à la personne publique les moyens de satisfaire les objectifs ci-dessus définis.

Les objectifs de développement durable, critère de sélection des PPP

Le Code des marchés publics de 2006 (art. 6) a introduit l’obligation dans les marchés publics de prendre en compte les objectifs du développement durable lors de la détermination de la nature et de l’étendue du besoin.
Si les textes prévoient expressément que les objectifs de performance dans le domaine du développement durable peuvent être instaurés en tant que critères de sélection, il reste que ce critère doit être utilisé avec précaution.

Les directives n°2004/17 et 18 CE du 31 mars 2004 et la jurisprudence prévoient que le critère environnemental dans les marchés doit avoir un lien avec l’objet du marché.

Cette condition est reprise aux articles 8-I alinéa 3 de l’ordonnance du 17 juin 2004 (art. L.1414-9-I alinéa 3 du CGCT), qui prévoient que les objectifs de performance, en particulier en matière de développement durable devront être définis en fonction de l’objet du contrat.

Il faut ajouter à ce qui précède que l’article 11 f de ladite ordonnance prévoit qu’un CP doit comporter nécessairement des clauses relatives « aux modalités de contrôle par la personne publique de l’exécution du contrat notamment en matière de développement durable et de mise en œuvre des clauses sociales ».

Par ailleurs, selon la jurisprudence de la CJCE les critères environnementaux ne peuvent être pris en compte pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse que sous trois conditions cumulatives :
- ne pas conférer au pouvoir adjudicateur une liberté inconditionnée de choix ;
- être expressément mentionnés dans le cahier de charges ou dans l’avis de marché ;
- respecter tous les principes fondamentaux du droit communautaire et notamment, le principe de non discrimination et d’égalité de traitement.


LE DEVELOPPEMENT DURABLE, UN MOTEUR POUR LES PPP

La notion de développement durable est prise en compte dans la problématique des PPP, suivant la loi du 28 juillet 2008 modifiée par une décision du Conseil constitutionnel du 24 juillet 2008.

Les PPP connaissent ainsi un essor particulier dans les domaines de l’éclairage public et des contrats de performance énergétique.

L’essor des ppp dans l’éclairage public

L’éclairage public fait l’objet d’une part importante des CP signés par les collectivités territoriales, et constitue un domaine dans lequel des préoccupations environnementales sont importantes et permet à la fois une économie d’énergie mais également la fourniture d’énergie « verte ».

On citera notamment les PPP d’Auvers-sur-Oise (Val d’Oise), Hérouville-Saint-Clair (Calvados), et la ville de Libourne (Gironde) laquelle a conclu un CP pour la mise à niveau et l’entretien de son éclairage public et de sa signalisation lumineuse tricolore. Au 2 janvier 2009, sur les 219 CP, 30 concernent l’éclairage public.
L’argument écologique est souvent avancé, au titre de la fourniture « d’électricité verte », de la rénovation des matériels et du recyclage des dispositifs remplacés. Ainsi, le syndicat d’agglomération nouvelle de Sénart-en-Essonne a conclu un CP de 15 ans présenté comme « entièrement dédié au développement durable » pour la reconstruction, la rénovation, la maintenance et la gestion de l’ensemble du système d’éclairage pour plus de 2 500 points lumineux. On retiendra l’importance cruciale de la définition des besoins, du recensement des points lumineux, des panneaux de signalisation. La définition de la performance souhaitée par la collectivité constitue l’un des points clés du CP.

L’essor des partenariats public privés dans le contrat de performance énergétique (CPE)

Le CPE consiste en un accord relatif à des prestations d’amélioration et d’économies d’énergie d’une structure. Le contrat de performance peut porter sur la gestion et l’exploitation de bâtiments, le financement et l’exploitation des éléments techniques, ou plus simplement l’isolation thermique des bâtiments.
Le CPE permet de prévoir le renouvellement des équipements dégradés et dresser un bilan énergétique de la commune.

Ainsi par exemple, en matière de chauffage urbain, le CPE constitue un complément de la commande publique. La directive européenne 2006/32 CE du 5 avril 2006 qui vise à promouvoir les services énergétiques a ouvert un nouveau cadre juridique destiné à faciliter la mise en œuvre de partenariats public privés au sein desquels les collectivités territoriales peuvent imposer leurs priorités en matière d’économies d’énergie.

Par ailleurs, nonobstant la décision du Conseil Constitutionnel (décision 2008/567DC), sanctionnant la généralisation du contrat de PPP, l’article 5 du projet de loi Grenelle I, prévoit : « lorsque les conditions définies par l’ordonnance 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat sont satisfaites, il peut être fait appel de façon privilégiée à des contrats de partenariat public/privé pour réaliser les travaux de rénovation en matière d’économie d’énergie portant sur respectivement les 50 et 70 millions de m² de surface des bâtiments de l’Etat et des principaux établissements publics ».

Ainsi, le recours au PPP apparaît comme une formule privilégiée, et un élément clé de la politique française de développement durable.

Une dizaine de projets de CPE sont actuellement en cours en France (notamment le projet de l’Université de Saint-Quentin-en-Yvelines), le premier CPE ayant été signé en octobre 2007 par la ville de Tours.

Ainsi, les PPP devraient-ils constituer un outil gagnant/gagnant à la fois pour le développement accéléré des programmes permettant d’améliorer l’efficacité énergétique et pour développer les politiques de développement durable.

Les points clés
Les directives n°2004/17 et 18 CE du 31 mars 2004 et le projet de loi Grenelle I prévoient que les critères environnemental et social dans les marchés doivent avoir un lien avec l’objet du marché.
Ainsi, les PPP devraient-ils constituer un outil gagnant/gagnant, à la fois pour le développement accéléré des programmes permettant d’améliorer l’efficacité énergétique et pour développer les politiques de DD.

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HUGLO LEPAGE & Associés Conseil est une société d’avocats, spécialisée en droit public et en droit de l’environnement et développement durable qui intervient notamment dans le cadre du montage d’opérations d’infrastructures complexes.
Corinne Lepage est avocat spécialisée en droit de l’environnement et en droit public, professeur à l’IEP de Paris et ancien ministre de l’environnement.
Adrien Fourmon est avocat en droit public des affaires et contrats publics.


Adrien FOURMON Avocat
&
Corinne LEPAGE Avocat Associé gérant
SELARL HUGLO LEPAGE & Associés Conseil

Publié dans Décideurs - Stratégie Finance Droit, février 2009

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