Les défauts d'isolation thermique peuvent relever
juridiquement de la garantie décennale du constructeur, d’après la Cour de
cassation, selon un arrêt récent rendu le 8 octobre 2013 (Cass. Civ., oct. 2013,
n° 12-25.370, non publié au bulletin), soit du fait que les défauts qui
compromettent la solidité de l'ouvrage soit qu’ils le rendent « impropre à
sa destination », selon les dispositions de l’article 1792 du Code civil.
A
ce titre, la juridiction saisie du litige doit donc rechercher si les désordres
en cause représentent une certaine gravité pour remplir les conditions de la mise
en cause de la garantie décennale du constructeur.
C’est donc principalement ce second critère qui peut trouver
à s’appliquer en matière d’isolation thermique (tout comme en matière d’isolation
phonique), la victime devant par conséquent démontrer que les malfaçons sont
telles qu’elles rendent la construction impropre à sa destination.
Selon la solution retenue par la Cour de cassation, les juridictions
du fond doivent ainsi « rechercher si les désordres engendrés par les
défauts d'isolation thermique ne rendaient pas la maison impropre à sa
destination », par une appréciation au cas par cas afin de déterminer si
ces défauts de performance énergétique empêchent l’usage normal de l’immeuble
concerné.
On reviendra sur les termes de cet arrêt (cf. également "la non-déclaration d'un chantier justifie la
règle proportionnelle de prime ou d'indemnité (art. L. 113-9) : la Cour de
cassation persiste et signe", P. Dessuet, RDI 2013 p. 603) :
« Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 juin 2012), que, le 5 septembre 2003, la société
Leman Chopard a conclu avec M. X... et Mme Y... (les consorts X...) un «
contrat de maîtrise d'oeuvre » en vue de la construction d'une maison à
ossature bois ; que sont notamment intervenus à la construction, la société
Ducrey Dupenloup chargée du lot terrassement-VRD, M. Z... chargé du lot
maçonnerie et M. A... chargée du lot menuiserie extérieure, assuré auprès de la
société MMA ; que les consorts X... ont pris possession de la maison le 28 août
2004 ; que se plaignant d'inachèvements, de non conformités et de malfaçons,
les consorts X... ont, après expertise, assigné les intervenants et leurs
assureurs en indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le moyen unique du
pourvoi incident de la société Ducrey Dupanloup, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant
retenu que la demande des consorts X... en paiement de la somme de 2 640 euros
au titre de la réfaction pour non réalisation du système d'assainissement
individuel et leur demande en paiement de la somme de 3 384, 68 euros au titre
du coût des travaux de remise en état des travaux d'épandage exécutés
inutilement étaient bien fondées, la cour d'appel a, sans violer le principe de
la réparation intégrale, souverainement apprécié les préjudices subis par les
consorts X... ;
D'où il suit que le
moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier
moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu que pour
débouter les consorts X... de leur demande formée à l'encontre de la société
MMA au titre du défaut d'isolation, l'arrêt retient que les désordres d'isolation thermique, seulement susceptibles
d'entraîner une augmentation de la consommation d'énergie et un certain
inconfort, ne relèvent pas de l'article 1792 du code civil ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les désordres engendrés par
les défauts d'isolation thermique ne rendaient pas la maison impropre à sa
destination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen
du pourvoi principal, après avis donné aux avocats :
Vu l'article 1134 du
code civil, ensemble l'article L. 231-1 du code de la construction et de
l'habitation et l'article L. 113-9 du code des assurances ;
Attendu que pour
débouter les consorts X... de leurs demandes formées à l'encontre de la société
CAMBTP, l'arrêt retient que le « contrat de maîtrise d'oeuvre » prévoyait en
page 5 que les travaux seront réalisés pour un prix global forfaitaire non
révisable à l'exception des travaux dont le coût n'est pas inclus dans le prix
global forfaitaire dont le maître d'ouvrage se réserve l'exécution et qui sont
décrits et estimés dans un devis, que la société Léman Chopard s'engage à les
faire réaliser à ce prix si le maître ouvrage en fait la demande, que ces
dispositions reproduisent les règles principales imposées par l'article L.
231-2 du code de la construction et de l'habitation, que la société Léman
Chopard a ainsi souscrit les obligations d'un constructeur de maison
individuelle, que l'exercice par un constructeur soumis à l'obligation
d'assurance de responsabilité décennale d'une activité qui n'est pas prévue au
contrat d'assurance constitue un motif légitime pour l'assureur de refuser sa
garantie, qu'il résulte des explications de la CAMBTP que la société Léman
Chopard n'a fait aucune déclaration pour leur chantier et que la méconnaissance
de cette clause constitue également un motif légitime de refus de garantie ;
Qu'en statuant ainsi,
par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un contrat de
construction de maison individuelle et alors que l'absence de déclaration d'un
chantier à l'assureur est sanctionnée par la réduction proportionnelle de
l'indemnité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais
seulement en ce qu'il déboute les consorts X... de leurs demandes formées
contre la société MMA et la société CAMBTP, l'arrêt rendu le 12 juin 2012,
entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur
ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de
Grenoble ;
Condamne la société
MMA et la société CAMBTP aux dépens ;
Vu l'article 700 du
code de procédure civile, condamne la société MMA et la société CAMBTP à payer
aux consorts X... la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ; »
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