mardi 3 décembre 2013

Non confiormité à la RT 2012 : Les défauts d'isolation constitutifs d'un désordre de nature décennale



Les défauts d'isolation thermique peuvent relever juridiquement de la garantie décennale du constructeur, d’après la Cour de cassation, selon un arrêt récent rendu le 8 octobre 2013 (Cass. Civ., oct. 2013, n° 12-25.370, non publié au bulletin), soit du fait que les défauts qui compromettent la solidité de l'ouvrage soit qu’ils le rendent « impropre à sa destination », selon les dispositions de l’article 1792 du Code civil. 

A ce titre, la juridiction saisie du litige doit donc rechercher si les désordres en cause représentent une certaine gravité pour remplir les conditions de la mise en cause de la garantie décennale du constructeur.

C’est donc principalement ce second critère qui peut trouver à s’appliquer en matière d’isolation thermique (tout comme en matière d’isolation phonique), la victime devant par conséquent démontrer que les malfaçons sont telles qu’elles rendent la construction impropre à sa destination.

Selon la solution retenue par la Cour de cassation, les juridictions du fond doivent ainsi « rechercher si les désordres engendrés par les défauts d'isolation thermique ne rendaient pas la maison impropre à sa destination », par une appréciation au cas par cas afin de déterminer si ces défauts de performance énergétique empêchent l’usage normal de l’immeuble concerné.

On reviendra sur les termes de cet arrêt (cf. également "la non-déclaration d'un chantier justifie la règle proportionnelle de prime ou d'indemnité (art. L. 113-9) : la Cour de cassation persiste et signe", P. Dessuet, RDI 2013 p. 603) :

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 juin 2012), que, le 5 septembre 2003, la société Leman Chopard a conclu avec M. X... et Mme Y... (les consorts X...) un « contrat de maîtrise d'oeuvre » en vue de la construction d'une maison à ossature bois ; que sont notamment intervenus à la construction, la société Ducrey Dupenloup chargée du lot terrassement-VRD, M. Z... chargé du lot maçonnerie et M. A... chargée du lot menuiserie extérieure, assuré auprès de la société MMA ; que les consorts X... ont pris possession de la maison le 28 août 2004 ; que se plaignant d'inachèvements, de non conformités et de malfaçons, les consorts X... ont, après expertise, assigné les intervenants et leurs assureurs en indemnisation de leurs préjudices ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Ducrey Dupanloup, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant retenu que la demande des consorts X... en paiement de la somme de 2 640 euros au titre de la réfaction pour non réalisation du système d'assainissement individuel et leur demande en paiement de la somme de 3 384, 68 euros au titre du coût des travaux de remise en état des travaux d'épandage exécutés inutilement étaient bien fondées, la cour d'appel a, sans violer le principe de la réparation intégrale, souverainement apprécié les préjudices subis par les consorts X... ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1792 du code civil ;

Attendu que pour débouter les consorts X... de leur demande formée à l'encontre de la société MMA au titre du défaut d'isolation, l'arrêt retient que les désordres d'isolation thermique, seulement susceptibles d'entraîner une augmentation de la consommation d'énergie et un certain inconfort, ne relèvent pas de l'article 1792 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les désordres engendrés par les défauts d'isolation thermique ne rendaient pas la maison impropre à sa destination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal, après avis donné aux avocats :

Vu l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation et l'article L. 113-9 du code des assurances ;

Attendu que pour débouter les consorts X... de leurs demandes formées à l'encontre de la société CAMBTP, l'arrêt retient que le « contrat de maîtrise d'oeuvre » prévoyait en page 5 que les travaux seront réalisés pour un prix global forfaitaire non révisable à l'exception des travaux dont le coût n'est pas inclus dans le prix global forfaitaire dont le maître d'ouvrage se réserve l'exécution et qui sont décrits et estimés dans un devis, que la société Léman Chopard s'engage à les faire réaliser à ce prix si le maître ouvrage en fait la demande, que ces dispositions reproduisent les règles principales imposées par l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation, que la société Léman Chopard a ainsi souscrit les obligations d'un constructeur de maison individuelle, que l'exercice par un constructeur soumis à l'obligation d'assurance de responsabilité décennale d'une activité qui n'est pas prévue au contrat d'assurance constitue un motif légitime pour l'assureur de refuser sa garantie, qu'il résulte des explications de la CAMBTP que la société Léman Chopard n'a fait aucune déclaration pour leur chantier et que la méconnaissance de cette clause constitue également un motif légitime de refus de garantie ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un contrat de construction de maison individuelle et alors que l'absence de déclaration d'un chantier à l'assureur est sanctionnée par la réduction proportionnelle de l'indemnité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute les consorts X... de leurs demandes formées contre la société MMA et la société CAMBTP, l'arrêt rendu le 12 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société MMA et la société CAMBTP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société MMA et la société CAMBTP à payer aux consorts X... la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ; »

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